Programme de salle – Le Firmament

    Le Firmament

    TEXTE Lucy Kirkwood
    TRADUCTION Louise Bartlett
    MISE EN SCÈNE Chloé Dabert

    AVEC

    Elsa Agnès
    Marie Middleton

    Sélène Assaf
    Helen Ludlow

    Coline Barthélémy
    Kitty Givens

    Sarah Calcine
    Hannah Rusted

    Bénédicte Cerutti 
    Elizabeth Luke

    Gwenaëlle David
    Sarah Hollis

    Brigitte Dedry
    Sarah Smith

    Marie-Armelle Deguy
    Charlotte Cary

    Olivier Dupuy
    L’huissier de justice

    Andréa El Azan
    Sally Poppy, Katy Luke

    Sébastien Éveno 
    Le juge

    Aurore Fattier
    Emma Jenkins

    Asma Messaoudene
    Peg Carter

    Océane Mozas
    Judith Brewer

    Léa Schweitzer
    Ann Lavender

    Arthur Verret
    Le mari / le médecin

    SCÉNOGRAPHIE 
    Pierre Nouvel

    LUMIÈRE 
    Nicolas Marie

    SON 
    Lucas Lelièvre

    COSTUMES 
    Marie La Rocca

    ASSISTANAT À LA MISE EN SCÈNE 
    Virginie Ferrere

    COLLABORATION ARTISTIQUE 
    Sébastien Éveno

    MAQUILLAGE, COIFFURE 
    Judith Scotto

    ACCESSOIRES 
    Marion Rascagnères
    Gwendoline Bouget

    RÉGIE GÉNÉRALE 
    Arno Seghiri

    RÉALISATION DU DÉCOR 
    Ateliers du Théâtre de Liège

    RÉALISATION DES COSTUMES 
    Magali Angelini
    Élise Beaufort
    Bruno Jouvet
    Peggy Sturm

    STAGE À L’ASSISTANAT À LA MISE EN SCÈNE 
    Mégane Arnaud

    STAGE AUX ATELIERS COSTUMES 
    Marion Chevron 
    Camille Debas Gauharou 
    Cléo Pringigallo

    RÉGIE PLATEAU
    Éric Raoul
    Vivien Simon
    Frédéric Gillmann

    RÉGIE SON
    Lancelot Munich
    Pierre De Cintaz

    RÉGIE LUMIÈRE
    Jean-Gabriel Valot
    Arno Seghiri
    en alternance avec
    Mathilde Domarlé 
    et Aurélien Charlier

    HABILLEUSE
    Élisa Rodriguez
    Nelly Geyres 

    Barbara Ouvray

    CHARGÉE DE PRODUCTION
    Marie Kermagoret

    Film

    RÉALISATION 
    Pierre Nouvel

    CADRAGE 
    Mohamed Megdoul

    CHEF OPÉRATEUR 
    Raphael Dallaporta

    ASSISTANAT AU RÉALISATEUR 
    Thomas Lanza

    FIGURANTS 
    Léone Lagrange
    Misha Charmillot-Ferrer

    Entretien avec Chloé Dabert 

    Quelle place ce spectacle a-t-il dans votre parcours ? 

    Depuis Iphigénie en 2018, je n’avais pas mis en scène de spectacle avec beaucoup d’acteurs. Pendant le covid, j’ai créé un monologue en 2020 puis un spectacle en lycée et un récit musical avec une autrice et une violoncelliste. Je crois donc que j’avais un manque et que j’avais besoin de retrouver du monde, acteurs mais aussi collaborateurs. Je voulais aussi sortir de l’espace unique dans lequel mon travail, très axé sur la direction d’acteurs, se concentre d’habitude. Résultat : ils sont seize sur scène ! Je connaissais l’écriture de Lucy Kirkwood. J’ai une affinité avec les écritures britanniques, notamment avec le théâtre de Dennis Kelly dont j’ai monté plusieurs textes. Quand j’ai découvert que Le Firmament venait d’être créé à Londres, j’ai lu la pièce : son histoire et son ampleur m’ont conquise. 

    En quoi consiste votre goût pour les dramaturges britanniques ?

    Chez beaucoup d’auteurs anglais, le travail approfondi sur la forme et le rythme croise toujours celui sur le fond, avec des questions très ancrées dans la société. C’est un théâtre complet, avec de l’humour et de l’émotion, qui est efficace parce que techniquement maîtrisé. Les auteurs sont présents en répétitions, ils réécrivent avec les acteurs et les metteurs en scène. Quand le texte sort, il a déjà été éprouvé et remanié grâce à ce travail et il est donc très abouti.

    Lucy Kirkwood fait partie de la jeune génération, héritière de Caryll Churchill. Il y a chez elle, de façon manifeste, ce côté formel, technique, d’un théâtre écrit pour les acteurs et en même temps des histoires très documentées et en prise avec le monde contemporain, à la fois drôles et émouvantes. De plus, comme Dennis Kelly, son écriture est très cinématographique. Elle raconte vraiment des histoires et s’amuse avec des codes de théâtre différents. Elle se renouvelle beaucoup d’une pièce à l’autre même si ses textes ont en commun une écriture qui va vite, avec un rythme extrêmement précis : ce sont de vraies partitions musicales.

    Quels sont les enjeux de ce texte pour la mise en scène ?

    C’est un vrai défi que de raconter cette histoire. Les scènes sont très différentes les unes des autres. La pièce commence par quatre scènes d’exposition dont une sans parole qui présente toutes les femmes en train de vaquer à une tâche ménagère et une autre plus cinématographique, à la bougie, où l’héroïne rentre chez elle couverte de sang. Après quoi on a un huis-clos de quasiment deux heures avec 14 personnes sur le plateau en costumes et toutes sortes d’effets spéciaux. Il y a enfin des scènes de violence physique. Tout cela pose des questions de transposition et de rythme, de changement d’espace et de code de théâtre. 

    Nous avons beaucoup travaillé en amont avec mes collaborateurs. Ce spectacle résulte vraiment d’un processus collégial. D’une taille inédite, il est aussi l’aboutissement d’un long parcours commun, dans l’invention d’un langage esthétique de pièce en pièce, à travers la scénographie, le son, la lumière, les costumes, la vidéo. 

    Comment la pièce résonne-t-elle aujourd’hui ?

    Le texte est très riche, on ne peut pas le réduire à un seul sujet. Il en contient plein. Certains résonnent directement avec aujourd’hui, d’autres, à rebours. En effet cette époque (l’action se déroule en 1759) marque le début de nombreux événements qui sont remis en question actuellement, qu’il s’agisse du discours médical sur l’hystérie féminine ou des empires coloniaux.

    Il est d’abord question de la domination d’une classe aisée sur des gens du peuple. L’héroïne tue la petite fille de la famille qui fait vivre et travailler toute la ville et qui, ce faisant, a aussi droit de vie et de mort sur tout le monde, hommes comme femmes : une famille qui exproprie à sa guise et fait justice elle-même, où le père viole impunément ses jeunes servantes. 

    Ensuite, la pièce montre des femmes qui n’ont alors aucun droit, et qui subissent leur sort, des grossesses multiples ou des maris violents. La question du corps est centrale : le rapport à la maternité, à la maîtrise du nombre d’enfants, à la sexualité aussi, au plaisir, dans un contexte où pèsent la religion et la superstition. C’est à cette époque que naît la gynécologie. Jusque-là tout se passait entre femmes, et soudain les hommes entrent dans l’affaire et commencent à élaborer des théories soi-disant scientifiques sur les ovaires qui vont justifier le statut inférieur des femmes.

    Il est aussi question d’emprise et de révolte : les plus âgées sont convaincues que l’accusée est influencée par son mari. Celle-ci proteste et revendique un geste politique réfléchi, puisque cette petite fille, en grandissant, aurait fait partie des oppresseurs. Elle a une vraie rage : pour elle, il se passe des choses plus graves dans la société que la mort d’une enfant, tout atroce qu’elle soit. D’ailleurs la plupart de ces femmes sont choquées par l’acte meurtrier mais ne sont pas dans la sensiblerie. 

    Pour faire entendre tous les échos de ce texte qui joue avec la langue du XVIIIe et navigue entre deux siècles, on a travaillé le jeu de manière très simple, très contemporaine et on a reculé le plus tard possible le moment où on mettait les costumes pour ne pas se faire piéger par la reconstitution.

    Un mot sur le titre et le rôle de la comète ?

    La comète fait le lien entre les époques, car elle revient tous les 75 ans. Lucy Kirkwood imagine peut-être qu’on pourrait avoir d’autres procès à chaque passage. Et puis, pendant qu’il se passe des choses graves dans la société, et à la fin dans l’enceinte même du tribunal, tout le monde regarde en l’air. Se joue là le rapport à la religion ou plutôt à la superstition qui détournent l’attention du peuple de sa propre oppression. Regarder vers le ciel, c’est aussi s’adresser à la justice divine, en désespoir de cause. 

    Comment avez-vous pensé la distribution ?

    Je suis partie des gens avec qui je travaille depuis longtemps – les trois garçons, Marie-Armelle Deguy, Bénédicte Cerutti, Gwenaëlle David, Elsa Agnès, et j’ai fait des auditions pour les plus jeunes. Après quoi j’ai construit la distribution autour des différences d’âge entre trois générations et de la diversité des corps et des énergies. Quand on a treize personnages féminins ensemble sur scène, on a besoin de les identifier clairement : ça a été un vrai casse-tête. 

    Il fallait aussi que les interprètes aient envie d’un travail choral, d’une aventure de groupe, car à la lecture les rôles peuvent sembler petits. Quant aux rôles masculins, en plus d’être réduits, ce ne sont pas des rôles flatteurs ! Ils sont quand même beaucoup au service de ces femmes. Or on n’est pas habitués à cette répartition sur les scènes de théâtre. Heureusement ces trois comédiens ont cet esprit de troupe. Le groupe – qui est impressionnant, a fonctionné avec beaucoup de bienveillance. Je pense qu’on avait tous conscience d’avoir un grand texte dans les mains et c’est un bonheur de travailler une telle matière.  

    Propos recueillis par Olivia Burton, août 2022


    Lucy Kirkwood

    Lucy Kirkwood est une autrice de théâtre britannique née en 1984. Fille aînée d’un analyste de la City et d’une professeure de langue des signes, elle passe son enfance dans l’est de Londres. Elle écrit ses premières pièces à l’université d’Édimbourg, où elle obtient son diplôme de littérature anglaise en 2007. 

    Elle se fait connaître en 2008 par son adaptation d’Hedda Gabler d’Ibsen : Hedda (Gate Theatre) et sa pièce Tinderbox (Bush Theatre). It Felt Empty When the Heart Went At First But It Is All Right Now (Arcola Theatre 2009), fruit de sa résidence avec la Clean Break Theatre Company et de son travail avec des femmes victimes du système judiciaire, révèle avec férocité les dessous des réseaux de prostitution et de trafic sexuel ; la pièce a été nommée pour l’Evening Standard Award – Best Newcomer John Whiting Award 2010. Lucy Kirkwood poursuit sa dénonciation de l’objectification de la femme et du sexe dans NSFW (2012, Royal Court Theatre). 

    Elle a aussi écrit deux pièces pour enfants pour le National Theatre, Beauty and the Beast (2010-2011) et Hansel and Gretel (2012-2013).

    Sa pièce Chimerica, inspirée par la célèbre photo de l’homme face aux tanks sur la Place Tienanmen lors des manifestations de 1989 en Chine, a été créée à l’Almeida Theatre en 2013 avant d’être reprise dans le West End la même année. Elle a été récompensée par le Susan Smith Blackburn Prize en 2014. Après la création de Moustiques en 2017 au National Theatre de Londres, Les Enfants est jouée au Royal Court, puis à Broadway aux États-Unis. En 2018, elle reçoit le Prix de la meilleure pièce aux Writers’ Guild Awards pour Les Enfants, et est élue membre de la Royal Society of Literature. Son œuvre The Welkin (traduction Le Firmament) est mise en scène par James Macdonald en 2020 au National Theatre à Londres.

    Son œuvre théâtrale est traduite depuis peu en France chez L’Arche : Les Enfants en 2019, Chimerica en 2020 et Le Firmament en septembre 2022.

    Lucy Kirkwood est également scénariste pour la télévision. Elle a écrit pour la série Skins (Company Pictures), créé et écrit The Smoke (Kudos / Sky 1). Elle travaille actuellement à la production de sa série Adult Material (Tiger Aspect Production) et l’adaptation télévisée de sa pièce Chimerica en une mini-série.

    Chloé Dabert

    Comédienne et metteuse en scène, Chloé Dabert a été formée au Conservatoire national supérieur d’art dramatique à Paris (CNSAD). Elle a joué notamment sous la direction de Joël Jouanneau, Jeanne Champagne et Madeleine Louarn.

    En 2012, elle fonde avec Sébastien Éveno la compagnie Héros-limite. Le spectacle Orphelins de Dennis Kelly, qu’elle crée à Lorient en 2013 est lauréat du festival Impatience 2014.

    Artiste associée au CDDB-Théâtre de Lorient, au CENTQUATRE-PARIS, au Quai-Centre dramatique national d’Angers et résidente à l’Espace 1789 de Saint-Ouen, elle met en scène des écritures contemporaines dont plusieurs textes de Lola Lafon et de l’auteur dramatique Dennis Kelly dont elle participe à faire connaître son écriture en France.

    En 2018, elle monte J’étais dans ma maison et j’attendais que la pluie vienne de Jean-Luc Lagarce à la Comédie-Française et Iphigénie de Racine au Festival d’Avignon.

    Elle dirige la Comédie, Centre dramatique national de Reims, depuis janvier 2019.

    En 2020, elle crée Girls and Boys de Dennis Kelly puis Dear Prudence, une commande d’écriture à Christophe Honoré dans le cadre du projet « Lycéen·ne·s citoyen·ne·s, sur les chemins du théâtre ».

    En 2021, elle met en espace Le Mur invisible de Marlen Haushofer pour Lola Lafon et Maëva Le Berre au Festival d’Avignon.

    Autour du spectacle 

    DIMANCHE 13 NOVEMBRE

    → Rencontre «THÉÂTRE ET DROITS FONDAMENTAUX»

    à l’issue de la représentation avec l’équipe artistique modérée par Stéphanie Hennette-Vauchez, professeure de droit public à l’Université Paris Nanterre, directrice du CREDOF et membre de l’Institut universitaire de France

    « Dans cette pièce qui confronte les femmes et la justice, sont abordées les questions de savoir comment les femmes jugent et comment elles sont jugées. »

    Stéphanie Hennette Vauchez

    SAMEDI 19 NOVEMBRE À 15H30

    → Rencontre AVEC LUCY KIRKWOOD SUIVIe D’UNE DÉDICACE

    modérée et traduite par Laura Cappelle, sociologue et critique théâtre au New York Times

    Entrée libre sur réservation 01 48 13 70 00 – 

    En partenariat avec L’Arche Éditeur et la librairie La P’tite Denise

    Aller au contenu principal