Programme de salle King Lear Syndrome ou les Mal élevés

    King Lear Syndrome ou les Mal élevés

    DU 19 JANVIER AU 4 FÉVRIER
    Du lundi au vendredi à 19h30, samedi à 17h, dimanche à 15h30
    Relâche le mardi
    Durée estimée : 3H30 avec entracte — SALLE Mehmet Ulusoy

    D’après Le Roi Lear de William Shakespeare
    ÉCRITURE ET MISE EN SCÈNE Elsa Granat
    Dramaturgie Laure Grisinger

    AVEC
    Lucas Bonnifait Le Roi de France
    Antony Cochin  Le neurologue et Kent
    Elsa Granat Regane
    Clara Guipont Aide-soignante
    Laurent Huon King Lear
    Bernadette Le Saché Gloucester
    Édith Proust Cordelia
    Hélène Rencurel Goneril

    ET Les interprètes amateurs en alternance
    Victor Albanese
    Gisèle Antheaume
    Zelka Aubel
    Claude Bardy
    Françoise Belkacem 
    Ghislaine Bréfort
    Victoria Chabran
    Sylvie Charlier
    Suzanne Delalande
    Hélène Jouffroy
    Kheloudja Merbah
    Christiane Porcher-Delaveaux 
    Suzanne Roux
    Jean-Jacques Tordjman
    Didier Tournès

    SCÉNOGRAPHIE Suzanne Barbaud
    LUMIÈRE Lila Meynard
    SON John M. Warts
    RECHERCHE MUSICALE Antony Cochin, Elsa Granat
    COSTUMES Marion Moinet
    ASSISTANAT COSTUMES Léa Deligne
    ASSISTANAT À LA MISE EN SCÈNE Jeanne Bred
    RÉGIE GÉNÉRALE Quentin Maudet
    RÉGIE PLATEAU Théo Chaptal , Adèle Collé 
    RÉGIE LUMIÈRE Richard Fischler 
    RÉGIE SON Sébastien Perron, Thomas Lascoux
    HABILLAGE Catherine Caldray
    CONSTRUCTION DÉCOR Suzanne Barbaud, Yohan Chemmoul Barthelemy – Atelier de l’Espace
    Administration, production, DIFFUSION Agathe Perrault – LA KABANE, Sarah Baranes  – LA KABANE, Camille Bard
    RELATION AVEC LE PUBLIC ET COMMUNICATION Jessica Pinhomme , Alexia Gourinal – 5ème saison
    RELATION PRESSE  Catherine Guizar


    Entretien avec Elsa Granat

    C’est la première fois que vous abordez un texte classique ?
    Oui. Jusque-là je considérais le théâtre comme un endroit de création pure et non pas comme patrimoine. Je travaille depuis assez longtemps sur la mort, la maladie et la fin de vie. J’ai senti cette fois le besoin de m’inscrire dans une histoire, plutôt que de batailler dans mon coin à vouloir créer des formes nouvelles. Il y a dans la langue poétique de William Shakespeare une solidité, une profondeur pour décrire tous les mouvements de l’âme humaine beaucoup plus grandes que moi. Et puis j’avais l’acteur pour le roi Lear : Laurent Huon, avec qui j’avais travaillé en tant qu’actrice chez Christian Benedetti, et qui a vécu une expérience de mort imminente. J’ai pensé qu’il avait l’expérience de vie pour jouer ce roi qui sent qu’il va mourir. Car finalement Le Roi Lear raconte l’histoire d’un homme qui sent que sa mort est imminente mais ne sait pas comment le formuler. Devant cette urgence-là, il fait n’importe quoi et risque tout. Comment appréhender l’approche de la mort ? Pour un humain ça reste toujours inacceptable. 

    Quels sont les partis pris de votre adaptation ? 
    Je ne mets pas en scène toute la cosmogonie, je prends seulement des axes qui m’intéressent : cet escalier vers la mort, et les relations parents-enfants. William Shakespeare a fait une merveille mais ce n’est pas un musée, c’est un jardin dans lequel je vais biner parce que tout ce qui était parlant en 1608 ne l’est pas forcément en 2022. Avec la dramaturge Laure Grisinger, nous avons travaillé sur le mythe plus que sur la littéralité de la pièce. 
    J’ai cherché à réveiller l’écoute de la langue ancienne, en la plaçant dans une situation que les contemporains pourraient accepter. Nous sommes donc parties du fait qu’un vieil homme d’aujourd’hui fait un AVC, suite à quoi il se met à parler bizarrement de son royaume qu’il veut partager entre ses trois filles. Ainsi la langue shakespearienne arrive par les anciens, comme le symptôme d’une maladie neurologique, une forme de délire. Le vieil homme sera diagnostiqué KLS par le neurologue : le King Lear Syndrome se manifeste par des accès de colère, une violence contre les êtres chers et surtout par le fait qu’il ne reconnaît pas sa benjamine. Les filles parlent une langue fade et molle d’aujourd’hui mais pour le récupérer, elles sont obligées de rentrer dans sa folie. Ainsi la vulnérabilité du parent les oblige à se métamorphoser.

    Que sont devenus les autres personnages du Roi Lear ?
    Gloucester est devenu madame Gloucester, une vieille dame que le père va rencontrer dans la maison de retraite où ses filles finissent par le placer. À cause d’une affection au cerveau, madame Gloucester confond ses deux fils, Edgar et Edmond qu’elle déteste. Lors de ses visites, ce dernier ne sait jamais comment sa mère va l’accueillir. C’était une façon de traduire le problème de la bâtardise présent dans le livre.
    Quant au personnage du fou, difficile à garder tel quel dans notre scénario, on a déplacé sa capacité à dire sans filtre ce qu’il voit sur le personnage de l’aide-soignante. C’est la plus proche des vieux mais elle est celle qu’on ne regarde jamais, qui n’est pas très importante – comme le fou dans le palais. Enfin Kent, qui ne peut pas lâcher son roi à qui il a juré fidélité, survit chez le neurologue, qui va l’accompagner jusqu’au bout. On a aussi glissé d’autres textes dans les moments de retour au passé : une chanson de Joan Baez, un peu de Guillaume Apollinaire et de Henri Michaux, pour donner d’autres éclairages poétiques à la langue des vieux.

    Comment dosez-vous tragédie et comédie ?
    Je travaille essentiellement sur ce mélange, à partir de situations absolument extrêmes de vie ou de mort, de spectacle en spectacle. Je cherche toujours à porter sur scène une dynamique vitale. Le goût français est très catégorique mais William Shakespeare porte cette tension tragi-comique au sommet. Il me semble que le vivant ne peut être représentable que si ces deux versants sont présents tout le temps. C’est extrêmement exigeant pour les acteurs. On ne va jamais totalement vers le grotesque mais on travaille à la limite, sur des bombes émotionnelles enchâssées, qui n’explosent jamais là où on les attend.

    Quel a été le processus d’écriture ?
    Je suis partie dix jours en 2018 avec des acteurs pour tester la validité du principe de coexistence des deux langues. On s’est rendu compte que ça fonctionnait bien. Ensuite j’ai écrit de mon côté puis Laure Grisinger m’a rejointe. Nous travaillons ensemble étroitement sur la construction du texte, sur ce dont a besoin pour que le spectateur nous suive. Car la place du spectateur est fondamentale, c’est bien pour lui qu’on fait tout ça, pour lui offrir une forme de catharsis. Il n’existe plus tellement d’espaces dans la vie aujourd’hui où l’on peut se permettre l’excès. Je ne cherche pas à estomaquer les gens, il faut juste qu’ils se sentent un peu dépassés, titillés et pleins d’une sorte d’ivresse : celle des émotions, du sens, de ce qu’ils voient aussi dans la scénographie… Bref qu’ils assistent à quelque chose de revivifiant.

    Quels furent les défis de la mise en scène ?
    La distribution s’est faite facilement. La plupart des comédiens sont des compagnons de longue date avec qui on se comprend très vite. C’est cette complicité qui permet de créer un tel objet. La difficulté pour la mise en scène était de faire coexister les deux pôles, celui d’aujourd’hui et celui de 1608. Et de tenir la durée d’une forme épique : déployer des décors qui ne soient pas lassants, par exemple, qui soient lisibles mais qu’on puisse déréaliser. Donner aussi sa juste place à la musique qui fonctionne pour moi comme un texte, comme un patrimoine.  Sur tous les plans, on essaie de faire en sorte que rien ne soit univoque, qu’il y ait toujours plusieurs facettes dans les scènes. Ce doit être très actif, très impliquant, pour l’acteur comme pour le spectateur qu’on cherche à mettre en état de curiosité vive. Cela donne un jeu très incarné, un peu brutal parfois, qui va au bout des choses. Pour moi le théâtre est une affaire de crise. La vitalité de la narration est essentielle, j’aime bousculer la linéarité et la standardisation des récits. On avance par rebonds, d’émotion en émotion, vers une autre scène. Le délire neurologique sur lequel on travaille induit forcément des trous, des moments d’intranquillité et de tension. Il ne s’agit pas pour autant de perdre les gens. On essaie de donner des codes clairs. Par ailleurs on pose sur scène des problématiques dont on parle beaucoup mais qu’on ne prend pas le temps de regarder : comment le corps vieux se déplace, le temps que ça lui prend ; ou combien leur métier coûte physiquement aux aides-soignantes. Le théâtre est vraiment l’endroit où l’on peut regarder ce qu’on ne voit plus dans la société. C’est pourquoi l’équipe est protéiforme, avec des corps et des visages hors des normes, qui permettent de rafraîchir le regard. 

    Propos recueillis par Olivia Burton, novembre 2021

    Elsa Granat

    Née à Marseille en 1981, elle commence le théâtre après ses études (khâgne et hypokhâgne), elle se forme au Conservatoire national à rayonnement régional de Marseille sous la direction de Christian Benedetti. Elle fait la rencontre déterminante d’Edward Bond à l’occasion d’un stage à la Friche de la Belle de Mai. À Paris, elle complète sa formation dans la classe libre du Cours Florent. Depuis 2004 elle a joué sous la direction de Christian Benedetti (L’Amérique, suite de Biljana Sbrljanovic, Oncle Vania et Les Trois Sœurs d’Anton Tchekhov), Serge Catanese (Caligula), Sifan Shao (Feydeau et Cetera), Benjamin Porée, (Andromaque, Platonov, Trilogie du revoir), Alain Ubaldi (La Chambre de Médée). En septembre et octobre 2019 elle joue dans Data Mossoul de Joséphine Serre à la Colline – Théâtre national. En janvier 2021, elle joue dans RIVIERA, dernière création d’Alain Ubaldi au Théâtre des Halles, scène d’Avignon. En tant que dramaturge, elle a été l’assistante de Jérôme Hankins sur le théâtre jeune public d’Edward Bond et de Christian Benedetti sur Lampedusa Beach de Lina Prosa et Existence de Edward Bond lors de la création de ces pièces à la Comédie-Française. Son texte, Dans les veines ralenties, a été monté par le Deug Doen Group et Aurélie Van Den Daele au Théâtre de l’Aquarium. Elle a fait la dramaturgie du premier spectacle de Lola Naymark, Pourtant elle m’aime. Elle crée plusieurs seul en scène à partir du désir d’un acteur de se découvrir. Elle met en scène avec Roxane Kasperski Mon Amour fou (2015), avec Christophe Carotenuto Quelque chose en nous de De Vinci (2016), avec Lola Naymark sur un texte de Guillaume Barbot, La nuit je suis Robert De Niro (2017). 

    Chacune de ces collaborations explore le champ de l’identité et tente de cerner ce qui rend chaque être humain irremplaçable. Avec Tire l’aiguille, spectacle musical créé en mai 2018 au Théâtre Antoine Vitez – scène d’Ivry, elle continue la même exploration avec des musiciens descendants de la Shoah. Elle travaille par ailleurs avec Milosh Luczynski plasticien numérique et Laure Grisinger sur l’hybridation entre numérique et théâtre via un procédé d’écriture augmentée, le projet Icona Furiosa, après une résidence au Centquatre et à La Chartreuse, centre national des écritures du spectacle. Elle crée avec Roxane Kasperski, en 2020 V.I.T.R.I.O.L au théâtre de la Tempête. En septembre 2020, elle participe à l’occasion, des Journées du matrimoine organisées par le Collectif H/F Île-de-France, au grand loto des femmes artistes oubliées, conçu par le collectif Incertaines et Fées, qu’elle a créé avec Claire Méchin et Marie Combeau. 

    Laure Grisinger

    Au terme de ses deux années de classe préparatoire littéraire à Toulouse, elle se spécialise en études théâtrales et obtient un double master à l’Université Paris 3. En 2012, invitée par le Théâtre régional de Merida (Mexique) à participer au Festival Otono Cultural, elle réunit sur scène quatre acteurs français et six musiciens mexicains pendant trois mois. Elle travaille sur la problématique du surtitrage au théâtre avec la troupe nationale mexicaine La Rendija. De retour en France, elle intègre l’équipe du Théâtre-Studio d’Alfortville, et devient assistante à la mise en scène de Christian Benedetti sur Le Projet Tchekhov. Depuis 2017, elle travaille en tant que dramaturge avec différents artistes. Elle développe, avec Elsa Granat, des spectacles et performances autour du soin et des relations intimes et politiques qui le structurent : Le Massacre du Printemps ; King Lear Syndrome ou les Mal élevés ; Artificiel (création en mai 2022 au Théâtre de Brétigny et au Grand Parquet, Théâtre Paris Villette ).  Après une résidence d’auteur à La Chartreuse, centre national des écritures du spectacle, elle crée avec Elsa Granat et Milosh Luczynski plasticien numérique Rature et Icona Furisosa, performances d’écriture augmentée au CENTQUATRE. 

    Au sein de la compagnie L’Usine à Lièges, avec Édith Proust elle se consacre à l’écriture et à la mise en scène de spectacles de clown contemporain : Le Projet Georges, « Romance et Jouissance » G. (création à La Manekine, scène intermédiaire des Hauts-de-France et au Théâtre 13 en mars 2022). 
    En 2020, accompagnée d’un groupe de douze adolescents de Villiers-le-Bel, du philosophe Benedetto Martini et des scénographes Mahmoud Halabi et Elsa Noyons, elle crée un spectacle immersif et nomade pour répondre à la question : La civilisation c’est par où ? au Moulin Fondu, centre national des arts de rue et de l’espace public à Garges-lès-Gonesses (projet lauréat du dispositif « Écrire pour la Rue 2019 » DGCA/SACD). Elle réalise un podcast dans le cadre de la distribution alimentaire qu’elle coordonne à La Goutte d’Or, Paris XVIIIe : Les femmes de Saint Bernard. 

    Depuis 2019, elle collabore également au projet artistique de la compagnie (S)-Vrai Stéphane Schoukroun et Jana Klein, et a participé à la dramaturgie de : Notre Histoire, Se construire, L la nuit. En parallèle, elle mène des ateliers d’écriture auprès de mineurs isolés étrangers auprès d’élèves du collège Albert Camus de Rosny-sous-Bois ; et dans le cadre d’ateliers de cinéma-répit pour jeunes aidants au sein de l’association Jeunes Aidants Ensemble.

    Autour du spectacle

    DIMANCHE 29 JANVIER
    → Rencontre avec l’équipe artistique à l’issue de la représentation modérée par Valérie Pihet, chercheuse en sciences humaines
    JUSQU’AU 20 février DANS LE HALL DU TGP
    → EXPOSITION PHOTOGRAPHIQUE DE Clara Chichin
    photographies prises au cours d’ateliers menés par la compagnie Tout Un ciel à l’EHPAD « Lumières d’automne »

    NAVETTES RETOUR
    La navette retour vers Paris
    Après chaque représentation, une navette est mise en place à l’issue de la représentation, dans la limite des places disponibles.
    Du lundi au vendredi, elle dessert les arrêts :
    Porte de Paris (métro, ligne 13), La Plaine Saint-Denis, Porte de la Chapelle, La Chapelle, Stalingrad, Gare du Nord, République, Châtelet
    Samedi 27 novembre, dimanche 28 novembre et samedi 4 décembre : dernier arrêt Gare du Nord

    Tarif : 2 €.
    Réservation à la billetterie avant le spectacle.

    La navette dionysienne
    Le jeudi, si vous habitez à Saint-Denis, une navette gratuite vous reconduit dans votre quartier.
    Merci de réserver au 01 48 13 70 00 ou à la billetterie avant le spectacle.

    LE RESTAURANT « CUISINE CLUB »
    est ouvert une heure avant et après les représentations et tous les midis en semaine.
    Réservation conseillée : 01 48 13 70 05.

    LA LIBRAIRIE DU THÉÂTRE
    est ouverte avant et après les représentations.
    Le choix des livres est assuré par la librairie Folies d’Encre de Saint-Denis.

    Un vestiaire gratuit est à votre disposition.

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