Programme de salle de La nuit sera blanche

    La nuit sera blanche – création
    D’APRÈS LA DOUCE DE Fédor Dostoïevski
    DIRECTION ARTISTIQUE Lionel González

    Du 6 au 22 avril 2022

    du lundi au vendredi à 19h30, samedi à 17h, dimanche à 15h
    relâche le mardi 
    Durée : 1h50– Salle Mehmet Ulusoy

    CONCEPTION ET JEU 
    Jeanne Candel
    Lionel González
    Thibault Perriard

    SCÉNOGRAPHIE 
    Lisa Navarro

    LUMIÈRE 
    Fabrice Ollivier

    COSTUMES 
    Élisabeth Cerqueira

    COLLABORATION ARTISTIQUE 
    Chloé Giraud

    RÉGIE
    Rachid Bahloul
    Ronan Fablet
    Bertrand Sombsthay

    HABILLAGE 
    Catherine Caldray

    Première version en septembre 2017, Un Festival à Villerville.

    Remerciements à Pierre Devérines et Marion Bois.

    Production Le Balagan’ retrouvé ; Théâtre Gérard Philipe, centre dramatique national de Saint-Denis.
    Projet soutenu par le ministère de la Culture – Direction régionale des affaires culturelles d’Île-de-France.

    Entretien avec Lionel González

    Qu’est-ce qui vous a conduit vers La Douce ? 
    Je fréquente Dostoïevski depuis longtemps, en tant que lecteur et comme homme de théâtre. Le premier spectacle que j’ai vu de Krystian Lupa, le metteur en scène qui m’a le plus inspiré, était Les Frères Karamazov, en 2000 au théâtre de l’Odéon. Ce fut un choc. Plus tard, c’est Anatoli Vassiliev, avec qui j’ai beaucoup travaillé, qui m’a transmis les outils fondamentaux dont j’avais besoin pour aborder Dostoïevski. Ainsi lorsque j’ai fondé ma compagnie avec Gina Calinoiu, Le Balagan retrouvé, notre premier spectacle fut une adaptation du Joueur. En 2017, je devais jouer une adaptation du Rêve d’un homme ridicule au festival de Villerville. Au dernier moment, j’ai décidé de changer. C’est en feuilletant le Journal d’un écrivain que j’ai découvert La Douce et sa lecture m’a complètement bouleversé. J’ai répété quelques jours, et j’ai pu improviser la première moitié de la nouvelle devant le public du festival. C’était le début du chemin. C’est sûr, il y aurait une suite. Mais je ne voulais pas être seul. Je sentais le besoin d’une traversée plus polyphonique de l’œuvre. 

    En quoi consiste votre travail d’adaptation ?
    Il s’inspire de cette pratique de Konstantin Stanislavski, l’Étude, qui consiste à improviser sur le canevas d’une pièce, avant d’aller au texte de l’auteur, pour se libérer de la mémoire des mots qui peut bloquer l’acteur, le couper de sa spontanéité et de ses impulsions. J’ai fait de ce moment de la répétition, la permanence de mon processus. Je porte l’Étude jusqu’au public. Ainsi je ne retourne pas au texte de Dostoïevski. Cela rejoint la question de l’invisible de l’œuvre, qui m’est chère. Je considère le texte comme une trace visible de toute une matière première beaucoup plus riche que les mots couchés sur le papier. C’est elle que je cherche à partager.

    Cette démarche prend un sens particulier avec Dostoïevski car elle rappelle son rapport à l’écriture. En effet, il préparait pendant très longtemps son canevas, puis il improvisait à l’oral ses romans et sa femme les prenait en sténo. Comme le raconte le traducteur André Markowicz, il y a beaucoup d’oralité dans le style de Dostoïevski. Il fait des répétitions tout le temps et ne produit pas une « belle langue » au sens où on l’entend en français. Toutes proportions gardées bien sûr, mon geste peut ressembler au sien : j’essaie de me raconter de façon extrêmement précise tout ce qu’il pouvait se raconter dans ses carnets préparatoires pour ensuite réaliser cette structure dans le présent de la représentation. Par ailleurs, dans son avant-propos de La Douce, Dostoïevski dit en parlant de son personnage : « Si un sténographe avait pu le surprendre et noter son discours, le résultat aurait été plus raboteux, moins achevé que ce que je présente ici. » Grâce à la présence de l’acteur vivant sur le plateau engagé dans ce processus, je crois que le théâtre permet d’aller encore plus loin dans cette recherche.

    Mais là je ne parle que de ma partition qui est celle qui est la plus proche de l’œuvre originale. Or, avec Jeanne Candel et Thibault Perriard, nous formons un trio. Ce sont trois façons de traverser cette nouvelle, différentes et complémentaires. 

    Comment avez-vous conçu ce trio ?
    Avec Jeanne Candel, nous faisons dialoguer nos chemins de recherche respectifs depuis de longues années. Nous avons beaucoup collaboré et sur plein de modalités différentes. Nos territoires de travail, apparemment hétérogènes, ont des racines communes très profondes. C’est en voyant son spectacle Demi-Véronique, que le désir de l’inviter sur cette création est né. Je voulais qu’elle vienne hanter la représentation, dans un geste plastique, un geste quasi-performatif à l’opposé de mon geste tout en parole. Quand nous avons visité cet espace du Terrier ensemble, elle a vu Loukeria, la servante, entrer et s’asseoir dans le fond du plateau, baigné d’une lumière du jour qui viendrait d’on ne sait où. Elle venait de commencer à écrire sa partition. 

    Quant à Thibault Perriard, notre dialogue a commencé sur la précédente création de la compagnie, Les Analphabètes. Son rapport à la musique, aux sons, sa façon d’occuper l’espace par ses installations, apportent toujours une dimension à mon travail, que je sais inatteignable sans lui. Il ouvre un accès direct à l’invisible de l’œuvre.

    Jeanne et Thibault sont des artistes très libres et très autonomes. Ce sont des créateurs. On ne les dirige pas. Je les invite à écrire leurs gestes artistiques à mes côtés. Nous frottons nos territoires, les uns contre les autres, en espérant que des étincelles se produisent. 

    Comment cette nouvelle peut-elle résonner à nos oreilles contemporaines ?
    Je ne voudrais pas fermer le sens en nommant certaines résonances plus que d’autres. Je suis curieux d’entendre ce que le public va nous raconter après le spectacle. Je suis impatient de découvrir à quoi les gens rêvent en traversant cette œuvre avec nous. L’important, c’est de ne pas bloquer cette possibilité. Vous savez, toutes les œuvres que Dostoïevski a écrites après ses six ans de bagne, peuvent être vues comme des réécritures de la Bible. Notamment, parce que le seul livre auquel il a eu accès pendant toutes ces années étaient le Nouveau Testament. Crime et Châtiment, est une réécriture de la résurrection de Lazare, Les Démons du possédé de Gérasa. Comme les paraboles des Évangiles, ses romans racontent autre chose que ce qu’ils ont l’air de raconter de prime abord. Ils nous parlent d’un autre monde, moins visible que le nôtre. Pour que ce deuxième monde apparaisse, pour qu’il soit aussi le territoire de nos rêveries, il faut que rien n’empêche cela. C’est l’un des principaux enjeux de l’adaptation. Cette nouvelle a été écrite il y a presque cent cinquante ans. Elle se déroule dans un monde qui n’est pas le nôtre, une société qui n’est pas la nôtre. Cette distance peut justement aider à la rendre atemporelle, à condition de s’assurer qu’elle ne produise pas du folklore ou que certaines circonstances ne deviennent pas aveuglantes du fait que la société et ses codes ont changé. Cela demande une grande vigilance. 

    Quelles voies cette parabole ouvre-t-elle ?
    Le spectacle est ma réponse à cette question. Comme je l’écrivais en 2019, quelques jours avant de commencer à jouer Les Analphabètes au TGP : 
    « Je rêve d’un théâtre épiphanique, qui chaque soir, dans l’actualisation du processus, lève le voile sur la vérité d’une œuvre. Cette vérité se révèle à tous, non pas à travers le décryptage raisonné et raisonnable des signes visibles de la représentation, mais par la circulation d’un invisible mis en mouvement par le processus et qui contamine tous ceux qui y participent. »

    Propos recueillis par Olivia Burton, mars 2022

    Lionel González

    Il suit l’enseignement du Studio-Théâtre d’Asnières et de l’École Jacques Lecoq (1998-2000). Il intègre ensuite la Compagnie du Studio, dans laquelle il sera à la fois acteur et assistant à la mise en scène. Très vite, il fonde sa compagnie, Le Balagan’ (2000-2004), avec laquelle il entreprend une recherche sur le théâtre masqué. 
    En 2003, il commence à enseigner au Studio-Théâtre d’Asnières. C’est également à cette époque qu’est créé le collectif D’ores et déjà, dont il devient l’un des piliers avec Sylvain Creuzevault. Pendant sept ans, ce sont plus d’une dizaine de projets qui voient le jour dont Visages de feu de Marius von Mayenburg, Baal de Bertolt Brecht, Le père tralalère et Notre terreur, deux créations collectives. Quand D’ores et déjà est dissous en 2011, il s’exile pendant deux ans pour participer à un laboratoire autour de Luigi Pirandello avec Anatoli Vassiliev.
    En 2013, il rejoint Jeanne Candel et La vie brève, notamment pour la création Le Goût du faux en 2014-2015. 
    Il travaille également avec Adrien Béal pour Les Voisins de Michel Vinaver et Le Récit des événements futurs, une création collective.
    En 2016, il fonde avec Gina Calinoiu une nouvelle compagnie, Le Balagan’ retrouvé. Ils créent trois spectacles Demain, tout sera fini, une adaptation du Joueur de Fédor Dostoïevski, Les Analphabètes, une création d’inspiration cinématographique, et La nuit sera blanche, une adaptation de La Douce de Fédor Dostoïevski.
    Parallèlement à son activité d’acteur et de metteur en scène, il développe une activité de transmission en solo (Studio-Théâtre d’Asnières, Chantiers Nomades) ou avec Jeanne Candel (CDC Toulouse, ESAD, Chantiers Nomades).
    Depuis quelques années, il travaille à l’ouverture d’un lieu à Vitry-sur-Seine, dédié à la recherche et la transmission de l’art de l’acteur. Il est également praticien Feldenkrais. 

    Le Balagan’ retrouvé

    Le Balagan’ retrouvé est fondé en 2016 par Lionel González et Gina Calinoiu, actrice roumaine aujourd’hui membre du Théâtre national de Dresde. Les deux acteurs se sont rencontrés en Pologne au cours d’un laboratoire mené par Anatoli Vassiliev. Ils développent ensemble un processus mêlant écriture de plateau et tradition théâtrale russe : « nous travaillons à partir d’œuvres qui nous préexistent, mais en gardant cette liberté qu’offre l’improvisation, et qui met l’acteur en action à un endroit si singulier ». S’inspirant du travail de Konstantin Stanislavski, Anatoli Vassiliev ou encore Krystian Lupa, la compagnie Le Balagan’ retrouvé a créé trois spectacles. Demain, tout sera fini, une adaptation du Joueur de Fédor Dostoïevski, est joué à Villerville en 2016. En 2019, la compagnie présente Les Analphabètes au Théâtre Gérard Philipe, centre dramatique national de Saint-Denis, puis en tournée. La pièce s’inspire du cinéma suédois des années 1970 et intègre une dimension musicale. La nuit sera blanche, nouvelle création du Balagan’ retrouvé, est présentée au Théâtre Gérard Philipe du 6 au 22 avril 2022. 

    En parallèle de ses créations, Le Balagan’ retrouvé ouvre à Vitry-sur-Seine un lieu consacré à l’art de l’acteur, entre recherche et transmission, comme l’exprime Lionel González : 

    « Il y a tant d’années que je rêve d’un lieu où je sois chez moi. Un lieu où je puisse faire ce que je veux, chercher ce que j’ai besoin de chercher sans avoir de comptes à rendre à personne. Un lieu où je n’ai pas besoin de justifier a priori mes désirs. Un lieu où je sois libre. 

    Ce lieu je l’ai acheté il y a quelques années maintenant à Vitry-sur-Seine, aux confins de Villejuif. Et j’ai commencé à le réhabiliter. C’est long. Mais j’avance. Je rêve que ce soit un lieu consacré à l’acteur, à l’art de l’acteur. Un lieu de théâtre oui. Mais pour les acteurs avant toute chose. Un lieu de transmission. Un lieu de recherche. Un laboratoire. Un lieu fait par les acteurs et pour les acteurs. Un lieu de ressource. Un refuge. Un lieu hors du temps de la production. Un lieu où l’acteur ne doit plaire à personne. Où il travaille. Pour lui. Pour faire progresser son art. Et rien d’autre. Ce lieu va voir le jour. Très bientôt. Je suis heureux. 

    Autour du spectacle 

    Dimanche 17 avril
    → Rencontre avec l’équipe artistique,  à l’issue de la représentation

    Informations pratiques

    NAVETTES RETOUR

    La navette retour vers Paris
    Du lundi au vendredi, une navette est mise en place à l’issue de la représentation, dans la limite des places disponibles.

    Elle dessert les arrêts :
    Porte de Paris (métro ligne 13), La Plaine Saint-Denis, Porte de la Chapelle, La Chapelle, Stalingrad, Gare du Nord, République, Châtelet
    Tarif : 2 €.
    Réservation à la billetterie avant le spectacle.

    La navette dionysienne
    Le jeudi, si vous habitez à Saint-Denis, une navette gratuite vous reconduit dans votre quartier. Merci de réserver au 01 48 13 70 00 ou à la billetterie avant le spectacle.

    LE RESTAURANT « CUISINE CLUB »
    est ouvert une heure avant et après les représentations et tous les midis en semaine.
    Réservation conseillée : 01 48 13 70 05.

    LA LIBRAIRIE DU THÉÂTRE
    est ouverte avant et après les représentations.
    Le choix des livres est assuré par la librairie Folies d’Encre de Saint-Denis.
    Un vestiaire gratuit est à votre disposition.

    Programme Salle_lectureTélécharger

    Aller au contenu principal